Verbatim du débat : Les enjeux de la démocratie en ligne

Lise Gervais (Relais-Femmes, animatrice de la journée)
Il a été question de l'accessibilité, la fracture numérique, tout le monde n'est pas égal vis-à-vis la technologie. On a aussi soulevé l'écart avec la pratique démocratique classique. On a des craintes que ça s'accentue s'il y a un développement vers une pratique démocratique cybernétique. Nous avons aussi soulevé la question de la consultation, la pratique démocratique par les technologies. Cela fait en sorte que le citoyen se retrouve plus en lien direct avec le gouvernement. Mais est-ce un plus ou un moins ? On peut dire que c'est un plus car il est en contact plus direct avec les élus mais ça peut aussi être un moins car il n'y a plus d'espace de médiation et de délibération et que le contact direct est une des caractéristiques dans certaines sociétés totalitaires où les espaces intermédiaires ont tendance à être coupés pour maintenir un contact plus direct. Est-ce que l'on se dirige dans cette direction ?

On a soulevé aussi des enjeux reliés à la nature des pratiques démocratiques. Ce n'est pas la même chose si on parle de consultation, de délibération ou de prise de décision. Qu'est-ce qui est possible par les nouvelles technologies ? Est-ce que toutes ces opérations sont possibles ? Il y a aussi la question des règles du jeu; une invitation à conserver l'esprit des règles classiques mais d'éviter une application trop mécanique de ces règles dans la pratique d'une démocratie en ligne. Vous avez maintenant la parole.

Sophie Romano (Logiciel Libre-Ahunstic)
Je pense qu'au niveau du Gouvernement, on est en train de nous sonder, de nous solliciter. Ils sont en train de mettre sur pied un service à la clientèle, comme n'importe quelle autre entreprise. La démocratie, en autant que le gouvernement est concerné [inaudible] nous sommes sondés par téléphones, de toute sorte de façon, peut importe le pourcentage de la population qui est d'accord avec le gouvernement. Que ce soit par Internet ou par téléphone, je ne vois pas pourquoi on parlerait de ça ici. Le service à la clientèle, c'est leur problème. Qu'ils fassent comme les autres, de toute façon, nous allons payer pour.

Là où je réagis davantage, c'est au niveau de la démocratie. La démocratie, c'est l'autorité du peuple. L'Internet a une façon d'être. (prenons par exemple la création d'un blogue aux États-Unis au sujet de la Commission Gomery). Il n'y a pas d'autorité qui va cacher l'information. Le côté social du Web, je le vois. Je verrais une démarche, de la part du gouvernement ou des bailleurs de fonds où l'on devrait beaucoup insister sur le financement des ressources informatiques dans les organismes communautaires qui sont l'une des premières expressions de la démocratie. Il faudrait que soit accepté le fait que les groupes communautaires puissent se doter d'un site web, de leur propre serveur, rentabiliser leur connexion Internet, recevoir du financement pour monter des sites web dynamiques et que cela devienne un encouragement pour l'expression populaire. C'est comme ça que je vois la démocratie sur le web.

Malika Alouache (Carrefour d'éducation populaire de Pointe St-Charles)
Je parlerais plus au niveau de l'accessibilité. Monsieur Gautrin parlait beaucoup des bibliothèques et des endroits où l'on pourra avoir accès mais j'irais plus loin en parlant d'appropriation. Car il ne s'agit pas de créer de la quincaillerie et de l'installer dans les bibliothèques... Les bibliothèques sont souvent saturées et les personnes qui y travaillent n'ont souvent pas de formation et ne peuvent pas aider les gens.

Gérard Deniger
Je trouve que la matinée s'est très bien déroulée et je trouve que Monsieur Cartier a bouclé la boucle. Monsieur Gautrin, langue de bois. Monsieur Cisneros et Monsieur Trudel, très belle recherche, bien documentée, très beau programme de travail annoncé mais le poids relève encore de nous, les organismes. La note d'espoir est venue avec Monsieur Cartier parce que si nous ne sommes pas [inaudible], nous sommes capables de nous adresser au gouvernement et à nos semblables. Mais le poids relève quand même de nous. Comment fait-on pour s'accompagner dans ça, pour ne pas se décourager ?

Hubert Simard
La question que je me pose par rapport à la démocratie en ligne est où se trouve la demande par rapport à la consultation en ligne ? Je suis d'une génération qui a dû se battre pour obtenir un processus démocratique ; il n'y avait pas de période de questions au conseil municipal, il n'y avait pas de bureau des audiences publiques (BAP). Je ne sens pas actuellement la même démarche pour obtenir ces services. Nous sommes davantage dans une approche de services gouvernementaux en ligne et la demande ascendante pour transformer cela en réponse à des revendications que l'on peut avoir sur la façon dont la consultation va se faire, je ne la vois pas encore. Des sondages montrent que 60% des internautes voient l'Internet comme un canal pour les consultations mais je ne vois pas où ça s'exprime actuellement.

Yolande Tourigny (Front commun des personnes assistées sociales)
La démocratie en ligne, je n'y crois pas beaucoup tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas été capable de relever des défis comme l'accessibilité et l'appropriation par les gens. Et j'ai de la difficulté à croire que ce sont les lieux publics comme les bibliothèques qui vont faire que ça va devenir accessible. Si je prends mon expérience personnelle, je travaille dans un organisme communautaire où je m'approprie l'ordinateur et j'ai l'impression que le soir, pour s'informer, on a l'impression de continuer à travailler. Parce que c'est devenu un autre travail rendu à la maison d'essayer de s'approprier l'ordinateur en plus de tout l'argent que ça demande. Si nous ne sommes pas capables de relever ces défis, est-ce qu'il faudra réinventer les rencontres de cuisine avec des ordinateurs plutôt que des bibliothèques ?

Jean-François Pelletier (politologue)
Je voudrais soulever ici un point de théorie politique ; nous vivons dans un système de démocratie représentative où l'on se doit d'abord d'élire des représentants qui eux vont ensuite voter des lois, vont prendre et assumer des décisions. Tantôt on parlait de la possibilité par Internet de prendre des décisions. Je suis surpris car je trouve que nous sommes loin de ça. Est-ce que l'on peut prendre des décisions sans d'abord voter des décideurs ? La possibilité de voter en ligne, à moins que je ne me trompe, c'est la possibilité de voter pour se choisir des représentants et je pense que nous sommes encore très loin de pouvoir voter en ligne sur tel ou tel projet de loi. Au niveau de la théorie politique, je ne vois pas de bouleversement majeur. Je trouve qu'il s'agit d'une technique de sondage plus évolué mais il n'y a pas de grand débat actuellement quant à une révolution du système démocratique dans lequel on vit.

Animatrice
Donc pour vous il ne s'agit pas de démocratie en ligne mais plutôt de consultation en ligne ?

J-F Pelletier
D'après ce que je peux voir à l'heure actuelle, oui.

Annie St-Pierre (Office des personnes handicapées du Québec)
Je réitère encore une fois la préoccupation que j'ai au niveau des personnes handicapées. On parle d'accessibilité et d'appropriation, deux enjeux majeurs pour les personnes qui ont des incapacités. Il y a un problème important d'accessibilité dans les lieux où une personne qui n'a pas accès à Internet pourrait avoir accès à Internet. Il y a déjà un gros travail à faire à ce niveau là. Au niveau de la déficience intellectuelle, l'appropriation est aussi un enjeu important. Donc je réitère encore une préoccupation importante. Au niveau du rapport du gouvernement en ligne, ce n'était pas très explicite. J'ai hâte de voir les orientations. J'ai manifesté pour que l'OPHQ ainsi que tous les organismes provinciaux qui œuvrent auprès des personnes handicapées soit consultés.

Bruno Pereira (École de langue ÉLATE)
Ce que j'entends c'est que les gens veulent avoir accès à l'information. L'autre côté de la médaille, c'est qu'il faut pouvoir publier de l'information [inaudible] Il faut trouver des outils simples pour que l'information circule.

Claude Demers (CACI Val-Morin)
Lorsqu'on parle de démocratie en ligne, on parle au fond de démocratie point. Si on parle de démocratie en ligne c'est en raison de l'instrument qui va nous permettre d'exprimer ce processus démocratique. Je viens d'une municipalité où les réunions du conseil municipal se tiennent à tous les mois et souvent on y retrouve que 7 ou 8 participants. Est-ce plus démocratique un conseil municipal devant un groupe de 7 ou 8 personne que ne le serait une démocratie en ligne avec une participation de quelques centaines de personnes ? On a choisit des décideurs, on les a élus. Et je me demande si la communauté virtuelle qui permettrait que les citoyens participent directement à la démocratie par le biais des nouvelles technologies où on pourrait retrouver non pas 7 ou 8 personnes mais 50, 100, 200 personnes dans une communauté, à partir de chez eux, cette communauté qui s'exprimerait ainsi ne serait-elle pas au fond plus réelle et plus démocratique que la démocratie que l'on connaît aujourd'hui ? La problématique de la démocratie en ligne c'est qu'elle émane des technologies, elle n'est pas idéologique. Elle émane de l'accessibilité des citoyens à une nouvelle réalité qui bouscule les choses. Pour moi, il est évident que les nouvelles technologies, les nouvelles réalités, nous posent un problème par rapport aux territoires, aux géographies traditionnels, franchissent les frontières et nous forcent à interagir malgré nous. La question n'est pas de trouver une façon de gérer une gouvernance de l'Internet. À ce moment-ci ce n'est pas, pour moi, le rôle du gouvernement, des élus. Leur rôle principal est vraiment de contribuer en tant que facilitateur - je ne dis pas qu'il faut être ignorant des autres problématiques - mais nous sommes encore loin de la coupe aux lèvres avec les nouvelles technologies. À mon sens, c'est de voir que les nouvelles technologies se rapprochent de plus en plus du domaine public et cela pose la question de l'appropriation, de l'accès. Ce sont vraiment les questions de services publics qui sont en jeu. Il faut concevoir les TIC non pas comme un service qu'on offre aux consommateurs mais comme un outil de développement, de participation au développement local.

Christian Vaillant (CLE Montréal)
J'ai entendu dire tout à l'heure que le gouvernement voulait faire un service à la clientèle. Le problème c'est que nous ne sommes pas une clientèle. Et je pense que ce n'est pas leur problème [au gouvernement], c'est notre problème sinon nous ne serions pas là aujourd'hui. Quant à notre ministre préféré du jour, j'ai l'impression qu'il est là pour consulter les groupes communautaires et faire en sorte que nous soyons partie prenante de ce projet. Maintenant, aura t-il les moyens de ses désirs, ça c'est une autre histoire. Je n'ai pas l'impression qu'il ait beaucoup de sous. Je pense que le gouvernement en ligne ne peut fonctionner que s'il conserve des services directs à la population. Car c'est bien beau de mettre une machine en route qui va concerner soixante pour cent de la population mais il y a aussi tous les exclus dont a parlé Madeleine tantôt. Il faut pouvoir conserver des services directs à la population parce que la communication avec les gens, c'est extrêmement important. Et si on n'a pas ces services, je crois qu'on va se priver d'une partie de la démocratie.

Allison Powel (Concordia)
On entend souvent que les jeunes participent moins à la démocratie. En fait, les jeunes agissent mais différemment. Pour faire avancer les projets démocratiques, il faut parler un langage qu'ils vont comprendre. Il faut lier leurs expériences et leurs réseaux sociaux, qui sont parfois local, parfois global avec une expérience démocratique. Ça ne veut pas dire de faire une consultation démocratique comme ça se faisait il y a 40 ans mais d'essayer d'impliquer les jeunes au niveau local mais aussi au niveau global en utilisant les nouvelles technologies, avec lesquelles les jeunes sont déjà très à l'aise.

Normand Robert (Fédération québécoise des centres communautaires de loisir)
La démocratie en ligne, c'est d'abord et avant tout un moyen, et non une fin. La démocratie doit naître, comme le disait Manuel [Cisneros] dans sa présentation, d'un ensemble des idées et non pas seulement un cumul des votes sur une donnée quelconque. Il y a des exemples concrets en ce moment, entre autre dans la question de l'aménagement urbain : le pont de l'autoroute 25... une commission du BAP vient d'être nommée pour statuer là dessus. On nous dit qu'il n'y aura pas de période d'information car il y en a déjà eu une en octobre 2002. Et on nous dit la même chose pour le projet de la rue Notre-Dame. Une entente a été conclue avec le ministère pour un nouveau projet mais il n'y aura pas de consultation parce qu'on avait déjà consulté en 2002. Le BAP avait pourtant dit non au projet de l'époque du ministère.

À mon sens, la démocratie en ligne peut très bien être une façon de limiter la participation publique, la démocratie participative, en tentant par exemple de limiter le nombre de courriels, de pétitions que l'on envoie par les moyens que l'on a actuellement, en tentant d'intégrer, par des formules de consultation en ligne et on ouvre la soupape pour empêcher de déborder de tout bord, tout côté. Donc à mon sens, la démocratie en ligne doit être un outil parmi un ensemble d'outils qui doit assurer une démocratie participative. Il faut forcer nos gouvernants à aller davantage vers une démocratie participative qui utilise la démocratie en ligne comme un moyen pour permettre la participation de l'ensemble de la population à l'amélioration de la société. Il faut donc, au départ, une volonté politique claire, définie, déterminée. J'ai l'impression que nous avons encore beaucoup de travail avant d'arriver à ce que nos gouvernements soient ouverts à l'élargissement de la démocratie participative.

Robert Roy (Connexion-Lanaudière)
Je viens de terminer une recherche sur les cybergouvernements au Canada et je suis en mesure de comparer ce qui s'est fait à Ottawa et à Québec. La première constatation d'une recherche comme celle-là est que l'enjeu fondamental demeure l'appropriation, par les citoyens, de ces nouveaux services, l'accessibilité, la formation, la promotion. Au-delà de ça, j'ai pu constater qu'à Ottawa, l'approche est beaucoup plus bureaucratique, se rapprochant davantage d'une administration en ligne que d'un véritable cybergouvernement. La preuve c'est qu'à Ottawa, j'ai rencontré des fonctionnaires. Pour le Québec, je suis un peu surpris de voir l'approche du ministre Gautrin, extrêmement progressiste par rapport à ce qui ce fait à Ottawa. À Ottawa, on parle d'administration en ligne, ici, on parle de véritable cybregouvernement, de gouvernement en ligne avec une insistance très forte sur la démocratie et la participation du milieu communautaire. La seule chose que je peux dire, c'est qu'en comparant les deux, je trouve que nous sommes chanceux au Québec d'avoir une approche comme celle là. Le milieu communautaire a la chance d'être consulté et le ministre Gautrin est très généreux de son temps. Il faut profiter de cette tribune pour imposer notre vision et éventuellement, aller chercher un peu de financement.

Malika Alouache (Carrefour d'éducation populaire de Pointe-St-Charles)
Je voudrais parler de ce que le communautaire, et de ce que l'on appelle plus largement la société civile, a comme espace dans le Web. Je pense que c'est un certain enjeu dans la démocratie. Les groupes communautaires ont dû, à un moment donné, prendre le train en marche parce que les bailleurs de fonds nous disaient « toute l'information est sur Internet, il faut envoyer les rapports par Internet etc. ». On a comme été pris de court, on a été obligés d'apprendre parce qu'on n'avait pas le choix. Mais par rapport à tout ce qui est affichage, information, échange, analyse, on est encore très très loin et je pense que ça peut être un élément important au niveau des enjeux et des discours autour de la participation démocratique et autres sujets par rapport à l'accès, à la communication et à la formation. Je trouve que l'on part dans toutes les directions... il y a les personnes handicapées, analphabètes etc. On sait qu'au niveau des facteurs d'exclusion, se sont pas mal tout le temps les mêmes, ceux qui ont moins d'argent, ceux qui sont moins éduqués, ceux qui sont vieux, ceux qui sont dans les régions rurales, les femmes. Je pense qu'il faudra avoir bientôt une forme de concertation sociale, civile, qui fera en sorte que toutes ces problématiques vont être ramenées à des représentants. Je pense que c'est très important si on veut que le Web demeure démocratique, il faut qu'on prenne notre place.

Magdalena Molineros
J'ai envie de donner un point de vue qui va au-delà de l'éducation, de l'accessibilité et de l'appropriation. Internet en tant qu'outil d'information et de communication, on est en train d'en faire un besoin. Les gouvernements développent le service à la clientèle pour rendre Internet plus accessible et pour faire des économies, pour l'administration publique. Or, cette économie que eux peuvent faire, qui va les [inaudibles] ? les individus bien entendu. Aussi longtemps que la connexion ne sera pas gratuite, cela n'incitera pas les gens à se connecter. Et aussi longtemps que les ressources financières ne seront pas disponibles pour les organismes communautaires, ça va créer encore moins d'aide à donner aux gens.

Michel Dumais (observateur des nouvelles technologies)
Présentement, la démocratie, la participation citoyenne, les jeunes l'ont très bien compris et ils ne nous attendent pas. Ils sont déjà loin devant de nous. Je vais vous donner un exemple. En ce moment, le Collège Notre-Dame-de-Lourdes est en lock-out. Les jeunes de ce collège se sont ouverts un blogue, ils y ont déposé tous les documents pertinents au lock-out, les enjeux et ils jasent de ça entre eux... des jeunes de 12,13,14 ans ! Et ils échangent. Ce que cela a fait c'est que le comité de parents s'est aussi ouvert un blogue. Et ce que j'ai su c'est que la direction, en apprenant l'existence de ces blogues, s'est vraiment demandé ce que c'était et ce qui s'y passait. Normalement les jeunes, on ne les entendait pas mais là... excusez-moi mais tassons-nous les mononcles. Les jeunes sont partis et il faut prendre conscience de ça.

Michel Cartier (Département des communications de l'UQAM)
En 1970, l'équivalent de Monsieur Gautrin de l'époque m'appelle et me dit c'est extraordinaire, il y a une nouvelle technologie qui s'appelle l'audiovisuel, ça pourrait aider pour la démocratie. En 1980, je ne sais plus qui était l'équivalent de Monsieur Gautrin mais il me dit, c'est extraordinaire les micro-ordinateurs viennent d'arriver et on pourrait faire quelque chose avec ça. Certains vont se souvenir que [inaudible] a existé et d'autres se souviendront que Michel Dumais, moi et beaucoup d'autres avons prêché pour Internet. Je pense que la parole la plus valable, c'est la personne qui a dit que ce n'est pas une question de technologie mais d'idéologie. À chaque fois que l'on descendait près des gens, et proches des problèmes concrets et pratiques, les gens embarquaient. Il faudrait être intelligent et non seulement mettre nos groupes en marche mais amener les jeunes à participer à ces groupes là ou a faire des groupes parallèles, je ne sais pas mais il faut augmenter la masse critique mais, encore une fois, autour des idées et pas seulement autour des bits d'information.

Pierre Trudel (Centre de recherche en droit public (CRDP))
Ce que je constate c'est qu'il y a une nécessité de réintroduire le service public dans tout ça. À l'époque où Internet a été introduit, et ce dans toutes les sociétés occidentales, le seul terme de service public était devenu banni du discours, ça n'existait plus. Tout n'était qu'un monde de marché et d'individus. Alors forcément, on se rend compte que si l'on veut parler de cyberdémocratie, il faut réintroduire les valeurs de service public, d'égalité, d'accès véritable et effectif de tous les citoyens; la capacité donc d'appropriation collective. Et c'est ça qui manque dans le discours de beaucoup de décideurs politiques et autres sur les technologies comme Internet, cette espèce de conscience que si c'est pour être une technologie à ce point universelle, et à laquelle on voudrait la faire servir, à des fins vraiment démocratiques, il faudra réintroduire comme quelque chose de légitime, l'idée même de service public et les valeurs qui y sont rattachées, des valeurs de soutien au dynamisme communautaire et toutes ces valeurs, dans beaucoup de ces politiques ont été réduites à des histoires de service à la clientèle et de basculement sur le Web parce que c'était trop cher.

Manuel Cisneros (Institut de coopération pour l'éducation des adultes)
En '94 ou '95, quand l'ICEA et la Puce communautaire ont décidé de créer Communautique, on a adopté une mission qui était de mettre les TIC au service des groupes communautaires dans une perspective d'élargissement de la démocratie. C'est-à-dire que dès les débuts de Communautique, on pensait aux possibilités démocratiques de l'Internet. Ça fait donc longtemps que les groupes de la société civile, les groupes communautaires, parlent de démocratie. Ce n'est pas nouveau, c'est au contraire un des principes qui exprime le mieux ce que nous voulons pour notre société. Alors lorsqu'il y a de nouveaux outils pour nous exprimer, pour parler, pour écrire, pour diffuser de l'information, nous pensons qu'il y a quelque chose à faire pour que la démocratie se développe davantage. Il ne faut pas seulement penser à la démocratie dans le sens de ce que le gouvernement veut faire pour notre société mais qu'est-ce que nous voulons faire pour la société, de quelle manière pouvons-nous développer notre démocratie ? Et pas seulement la démocratie globale, seulement au niveau des pays, de l'Assemblée nationale mais aussi la démocratie dans les organisations, dans notre façon de fonctionner tous les jours. Je pense que par définition, les groupes communautaires ont toujours essayé de développer les pratiques démocratiques dans leurs activités. Il faut commencer à transposer la démocratie réelle vers la démocratie virtuelle. Nous faisons d'ailleurs une proposition dans ce sens, c'est-à-dire que tous les groupes communautaires qui ont toujours pris le parti de la démocratie, ont maintenant à transposer leurs valeurs dans le cyberespace, et on doit aussi se demander quel genre de démocratie nous voulons pour notre société ? Ce n'est pas facile car nous avons tous les problèmes que nous avons soulevés ce matin et c'est pour cela que l'on parle toujours de créer des ponts pour aller chercher les gens qui ne sont pas branchés. Au niveau de l'éducation, il y a eu beaucoup de discussion au sujet de la formation à distance et dans toutes ces discussions on a commencé à [inaudible]... Peut-être que la nouvelle démocratie dans nos sociétés sera un peu hybride. Certaines choses se feront sur Internet et d'autre devront se faire dans la réalité.

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